Outre qu’elle a défrayé la chronique à l’été 2018, l’obligation de dénonciation des crimes et des délits à laquelle sont tenus un grand nombre d’acteurs de la vie publique et prévue par l’article 40, alinéa 2, du code de procédure pénale, connait une actualité particulière dans le contexte de la mise en oeuvre de la loi Sapin Il. En effet, cette dernière renouvèle le droit de la dénonciation — se pose donc la question de l’articulation entre le régime de l’article 40 et celui de l’alerte — et le droit pénal des affaires — dans lequel l’article 40 joue un rôle déterminant de longue date. Dans les deux cas, la culture de la transparence, de la prévention et de la coopération que la loi Sapin II promeut doit être confrontée à une culture de défense de l’intérêt général par le biais de la dénonciation, plus limitée aux fonctions publiques, et dont les contours et la pertinence sont interrogés.
L’article 40 du code procédure pénale, dans son ensemble, est un texte essentiel de la procédure pénale en ce qu’il définit le rôle du parquet et de l’Administration dans la procédure pénale.
En effet, l’alinéa 1 consacre le principe de l’opportunité des poursuites — en cela, il influence de manière très profonde le rôle du procureur de la République — et l’alinéa 2 régit une articulation fondamentale entre l’Administration et l’autorité judiciaire, en disposant :
« Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
Comme le révèle sa formulation, cette obligation de dénonciation est ancienne. Elle date du Directoire, moment où l’expression d’autorité « constituée », par opposition à l’autorité « constituante », était bien plus communément usitée.
L’article 40, alinéa 2, a donc ceci de singulier qu’il renvoie le lecteur du code à l’origine même de la constitution de l’État. Ce faisant, il symbolise son unité, notamment en manifestant que toutes les autorités constituées partagent une même définition de l’intérêt général auquel l’Administration et l’autorité judiciaire travaillent ensemble.
Alors que se développe, à marche forcée, une culture de la transparence et que commence à prendre forme un véritable « droit de l’alerte », la particularité de cette antique obligation générale de dénonciation pose question.
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